samedi 22 février 2014

Colorado t'es bô aussi

Aujourd'hui, je vais gravir la plus haute dune d'Amérique du Nord.
Aux USA, tout est toujours le plus ceci ou le plus cela. Par exemple dans le comté de Los Alamos, c'est là qu'il y a le plus d'impacts de foudre chaque année. Et il n'est pas rare de rencontrer des gens qui ont vus de prêt la foudre. Par exemple, ZheFrenchy a rencontré un mec, jardinier de son état, qui ne traine plus jamais dehors lorsqu'un orage se pointe. Et pour cause, un jour qu'il admirait en compagnie d'un pote, le Rio Grande serpentant tranquillement au fond d'un canyon, la foudre s'est abattue pile poil entre les deux amis, les expédiant 10 m en arrière (détail important, car en avant, ils faisaient le plongeon de leur vie dans le Rio Grande).


Bref, revenons à ce qui nous préoccupe ici, l'escalade de Zhe dune. Elle porte le doux nom de Star dune et il ne faut surtout pas la confondre avec High dune, la dune proche du parking. En effet, à cause d'une illusion d'optique, tout le monde croit que c'est la plus haute et se précipite pour l'escalader. Et là, c'est le drame, car une fois en haut, Zhe dune avec ses 30m supplémentaires, vient narguer le pauvre randonneur mal préparé.


C'est ainsi que j'ai décidé de suivre ma propre voie, de ne pas me précipiter sur la première dune en face du parking. Je suis tout seul. Le chemin n'est pas tracé. Au début, tout est simple, les petites dunes peu pentues. A piece of cake cette ascension ! Star dune, me voilà ! Sauf que voilà, marcher dans le sable, ça fatigue vite. Surtout lorsqu'il faut monter puis redescendre les petites dunes qui se trouvent sur mon chemin. Très vite, mon corps me rappelle à l'ordre. Sylvain, tu es à plus de 2700m d'altitude et l'oxygène se fait plus rare. Je tente alors d'élaborer une stratégie pour me fatiguer le moins possible. Je vais suivre les crêtes des dunes, pour toujours progresser, jamais descendre. Sauf qu'avec cette stratégie, je me retrouve vite face à un mur de sable, une pente raide de chez raide. Je tente de l'escalader gentiment, mais pas moyen d'avancer. Je fais du sur-place à brasser du sable. Seul moyen pour avancer, agiter mes jambes plus vite que le sable qui s'écoule à chacun de mes pas. Horrible. Je crois clamser. Mes poumons sont au bord de l'explosion... Un vieux gout de sang remonte dans ma bouche. Putain d'épreuve physique. Une fois passé le plus, je me retrouve enfin sur les pentes, moins raides, de Star dune. Le spectacle est magnifique. J'en oublie presque que je suis à bout de souffle. Je n'ai qu'une idée en tête, arriver au sommet de Star dune, qui est devenu au cours de cette ascension, mon petit Himalaya à moi, rien que ça ! Je fais quelques pauses pour reprendre mon souffle et m'hydrater. Enfin la dernière ligne droite. J'aperçois le sommet de la dune. Arrivé au tout en haut de la dune, une sensation de liberté énorme m'envahit. Putain, I did it ! C'est bô. Un spectacle à couper le souffle (faut croire que je n'étais pas tout à fait à bout de souffle et qu'il m'en restait un peu pour me le couper. Pas mal celle là ?!!). Le tout filmé, par mes soins, pour que vous puissiez vous faire une idée des dernières minutes de mon ascension (et de mon souffle coupé).



Je suis resté là haut, de longues minutes pour m'imprégner de la vue (et aussi pour reprendre mon souffle...). J'ai vraiment de la chance d'être la haut. Je m'envie moi-même :).

Escalader la plus haute dune d'Amérique du nord : CHECK !

mardi 18 février 2014

New-Mexico, t'es bô


Pour mon premier road trip en solo, je décidais d'aller dans le Colorado, voir les grandes dunes de sable (Great Sand Dunes National Monument, pour les puristes). Je n'y étais encore jamais allé. Et puis il me fallait traverser le nord du Nouveau-Mexique que j'affectionne particulièrement. Deux bonnes raisons pour aller voir si le sable est plus jaune là-bas.
Je partais donc de bon matin, ce dimanche, pour rejoindre ma première étape, la petite ville de Chimayo et son sanctuaire, aussi surnommé le Lourdes d'Amérique du Nord (Tient, je me demande pourquoi ils ne l'ont pas nommé New-Lourdes, comme tant d'autres villes....). En chemin, je m'arrête à la ville carrefour indienne de Pojoaque pour faire des réserves d'eau et de barres énergétique à la station service du coin. Le type à la caisse est tatoué du cou jusqu'aux phalanges des mains (peut-être celles des pieds l'étaient aussi...). C'est assez impressionnant. En regardant autour de moi, les autres clients étaient aussi tatoués pour la plupart, qui des bateaux, qui des fleurs, des cœurs transpercés, des lettres, des trucs non reconnaissables.... Me prends l'envie urgente de me tatouer un truc, et faire un peu plus couleur locale (mon pull à capuche rouge avec le symbole ZIA ne suffisant pas). Je me mets à fouiller dans la poche gauche, puis dans la poche droite de mon manteau. Lorsque je tombe enfin sur mon stylo noir 0.5 microns, ouf, je vais pouvoir me faire un beau tattoo. Lorsque je quitte Pojoaque, je me retrouve dans le pueblo de Nambé, puis dans le désert. Les paysages sont magnifiques, des mesas, des petits arbustes et des formations rocheuses à perte de vue. A Chimayo, la messe se termine. Sortent de la petite chapelle, des jeunes femmes, des hommes, des vieux, tous tatoués. Et que ça continue ! Je visite la chapelle. Au détour d'une porte, je me retrouve dans une petite pièce circulaire de 2m de diamètre, moins de 2m de haut, avec en son centre, une petite pelle de bac à sable. Tient, qu'est-ce donc ? Me voici, dans le saint des saints, dans la Holly mud room (et la petite pelle permet de récupérer un peu de terre sacrée (Holly mud)). Je ne peux m'empêcher d'en prendre un peu et m'en tartine les mains, on ne sait jamais. En sortant de la chapelle, je longe des murs sur lesquels sont collés des milliers de portraits d'inconnus et pour lesquels des gens ont certainement prié les mains pleines de terre...
La chapelle de Chimayo et sa terre sacrée
Je reprends la route et traverse à nouveau des paysages grandioses qui me bouleversent. Je ne sais pas pourquoi, mais je suis ému. Je me sens tout petit, perdu dans un monde immense. Je me sens tellement loin de Paris et de la Normandie. J'ai l'impression de découvrir un nouveau monde.
Enfin bon, je ne suis pas le premier, puisque ça et là, gisent des carcasses de voitures, des vieux-mobiles ponctuent le paysage, pour constituer de petits hameaux, des villages perdus, loin de tout. Quelques familles d'indiens pueblos ou bien des ancêtres des premiers conquistadors espagnols sont à l'origine de la plupart de ces hameaux. Drôle de mélange.
 
Je commence à avoir faim. Je choisis le restaurant avec le plus de voitures devant, à défaut d'être un gage de qualité, je suis sûr de retrouver un peu d'animation et me distraire pendant le repas. Et de la distraction, j'en ai eu. Je m'assois à une table quand le mec derrière moi, me prend par le coude et me dit que j'ai choisi "the best place". Je lui réponds et il capte directement mon accent. C'était parti pour les présentations. Lui, c'est Ron. Le questionnement "d'où tu viens, que fais-tu, depuis combien temps...." et les conseils "tu devrais gouter ça, teste le chili...". Avant de partir, Ron me file sa carte de visite avec son numéro de téléphone en me tenant toujours le coude. Et au cas où j'ai des problèmes de vue, Ron écrit en plus gros son numéro de tel sur une feuille de commande de la serveuse et me glisse, toujours en me tenant le coude, mais cette fois-ci, en me regardant droit dans les yeux : "Si tu t'ennuies, n'hésite pas à m'appeler, hein ;)!".... Ron a au moins 60 ans... Pendant ce temps, à la table d'à coté, un très vieux cowboy (je dirais 80 ans), le Stetson vissé sur la tête, n'arrête pas de poser des questions à voix basse chaque fois que la petite serveuse passe. Pourboire oblige, elle s'approche chaque fois plus prêt de lui, écoutant le vieux cowboy lui répéter sa question, tout en profitant pour lui tenir le coude, elle aussi. En sortant du resto, je tombe sur un autre vieux (décidément), en béquille celui-là. Il bafouille et me demande un "ride" pour le centre ville. Seulement, le vieux, il ne sait pas que je l'ai vu reluquer et interpeler une autre petite serveuse pendant tout le repas, en suggérant des trucs graveleux. Tant pis pour lui. Je le laisse sur place, direction le centre ville (de Taos)
En sortant de Taos, je me retrouve à nouveau plongé dans des paysages de fou. De grandes plaines de buissons, ponctuées par des petites montagnes, avec au loin, le Colorado et ses grandes montagnes au sommet enneigé. Le ciel est gris, voir menaçant. Les couleurs sont terribles. Je trippe grave et fait chauffer l'appareil photo.
 
La transition vers le Colorado, est marqué par le passage des maisons en adobe à des maisons en bois... ainsi que par les premiers coffee-shop (et oui, la vente de marijuana est légale depuis le début de l'année) !!
Il commence à se faire tard. Je décide de m'arrêter dans un village-carrefour, Fort Garland, 433 habitants, 2 motels en bord de Highway et un restaurant vide à l'heure du diner. Je suis le seul client. Je vais me coucher, des images plein la tête. Je dois me reposer, car demain est un grand jour. Je vais tenter d'escalader la plus haute dune d'Amérique du nord, soit presque 3000m d'altitude !

La maison du Christ...
 
 
 
 

 
 
 
 
Le Colorado et ses montagnes enneigées
Fort Garland, la ville carrefour

lundi 10 février 2014

Home Exchange Asymmetric

J'ai testé pour vous l'échange, le troc, le (fair) trade, redevenus à la mode en cette période de crise, de remise en question de nos modèles de société, rien que ça ! J'ai donc testé l'échange de services mais aussi l'échange de maison (mais pas encore l'échange de femme, je vous vois venir.... J'ai une éthique!!).

Ainsi outre ma mission de mulet, et l'échange de mon maigre savoir-faire contre du matériel en état de marche, j'ai surtout échangé, troqué, mon domicile parisien (un studio mal insonorisé de 20m²) contre celui d'une famille de Santa Fé. Pour que l'échange soit fair, j'ai mis sur mon annonce en ligne plus de 30 photos de mon appartement. Le studio en mode jour, le studio en mode nuit. Photos prises dans les 4 coins de l'appartement. La douche. Gros plan des toilettes. La cuisine. La vue de la fenêtre. Autant vous dire, qu'ils connaissaient mon appartement aussi bien que moi. Rien n'a pu leur échapper. Et c'est donc en pleine conscience qu'ils ont accepté le troc (je m'en suis assuré, je vous jure). Voici le deal : Je passe 3 mois dans une authentique casita datant de la fin 19ème, aux murs en adobe (petit ajout pour vous culturer, merci Sophie :)), composée de 3 grandes pièces, avec tout le kit (cheminée et chauffage au sol, dryer (sèche-linge), douche à l'italienne...). Pendant ce temps, deux sœurs vont devoir vivre ensemble pendant plus de 6 semaines, confinées dans mon studio de 20m² (la surface standard de leur dressing !). Elles devront se faire une place entre l'étendoir à linge et le lit. Et oui, ici, pas de place pour le dryer. Boire de l'eau froide, mais pas glacée, car elles ne trouveront pas de distributeur de glaçon dans le petit frigo. Et le pire de tout, elles devront partager le canapé-lit qui grincera chaque fois que l'une d'elles bougera (j'ai pourtant pulvérisé du téflon sur tous les ressorts avant de partir, mais rien n'y fait). Pas moyen donc d'aller faire pipi discrètement pendant la nuit. De toute façon, elles auraient du allumer la lumière pour éviter de trébucher sur la table basse ou bien l'étendoir à linge. Pour couronner le tout, je viens de leur apprendre que le studio se situe au 3ème étage européen, c'est à dire au 4ème étage américain (et bam! un étage de plus dans ta face). Et oui, comme il faut toujours qu'ils se démarquent de nous autres, ceux de la vieille Europe, en plus de leurs miles, leurs inches... les américains ont décidé de commencer la numérotation des étages à 1 (au lieu du rez-de-chaussé)... Ah oui j'oubliais un petit détail, les deux sœurs ont plus de 70 ans......chacune (pas au total !!)..... Mais les sisters, de vraies pionnières que rien n'arrête, ont déjà trouvé la solution. Elles prévoient d'installer une chaise au 2ème étage pour faire une pause. Et pour les courses, me diriez-vous... elles comptent tout simplement acheter pour plus de 100€ de course (en complétant avec du champagne ou de bonnes bouteilles de pinard s'il le faut) afin d'être livré gratuitement au 3ème étage.... Elles ne vont pas dessaouler pendant 6 semaines...

Pour conclure cette échange, si fair, j'ai été invité plusieurs fois à déjeuner avec les deux soeurs, leur frère, à qui appartient la casita, accompagné de sa femme, de sa fille et de sa petite-fille.

Étranges déjeuners

La femme du proprio est une artiste. Elle peint. Surtout des portraits. Et elle porte des grosses lunettes de soleil, comme celle de Jackie Kennedy. Elle a la peau lisse, très lisse. Et lorsqu'elle commande son repas, elle ne regarde pas la carte, jamais. Ça ne sert à rien. Elle demande ce qu'elle veut. Parce qu'elle le vaut bien. Et lorsque les bagels ont des graines de sésames dessus, s'en est trop. Elle ne mange que la mie au milieu du bagel...
La petite fille s'appelle Calico S. Elle ne parle pas, sauf pour geindre. Elle ne mange jamais ce qu'elle a dans son assiette. Elle dessine sur les tables (ce n'est pas de sa faute, dans chaque resto, on lui apporte le kit enfant: des crayons et une feuille à colorier). Elle écoute sa musique, avec son gros casque rose. Pour entrer en communication avec elle, tout le monde lui parle en langage des signes. Et lorsqu'elle daigne s'adresser à nous, c'est pour nous faire écouter, sur son AïePhone, son spot publicitaire (celui qu'elle a écrit elle-même, "elle est si intelligente ma fille"). Voici le spot : "s'il fait mauvais temps et qu'il y a une averse de chouettes qui s'abat sur votre quartier. Pensez à utiliser une pelle à chouettes pour déblayer votre trottoir". Voilà, c'est tout. Euh, c'est quoi ce délire ? Se sentir obliger de dire "Yes, it's so cute" (ça fait parti du deal, de l'échange (culturel)).
Au fait, pourquoi Calico S (que je demande poliment à la mère). "Le S. c'est pour Sky". Ah. Et Calico alors ? "C'est le nom qu'on donne au chatte avec 3 couleurs (en France on dit "écaille de tortue". C'est moins glamour). Car lorsqu'elle est née, elle avait des tâches de couleurs sur tout le corps. Alors, j'ai pensé tout de suite aux chattes à 3 couleurs. Et je l'ai appelé Calico. Ca lui fitte si bien, hein ?" Euh, c'est quoi ce délire ? Se sentir obliger de dire "Yes, it's so cute" (ça fait parti du deal, de l'échange (culturel)).
Quant à la mère, elle s'emballe lorsque que je décris mon boulot, les os, les microfissures, tout ça, tout ça. Elle embraye alors sur le cancer des os de son père. Des trous qu'on lui a faits dans les os. Du comblement osseux (thérapie cellulaire à partir de cellules souches. Trop coooool). Puis de la rechute et des tumeurs grosses comme des oranges dans le cerveau, qu'on devait lui enlever une à une. C'est bon, c'est bon, on mange. Arrête. Arrête je te dis. J'ai compris. Elle est de plus en plus chaleureuse avec moi (faut dire que je lui ai parlé de mon épisode Urgence, "It's so painfull, you should have called me to drive you to the emergency. It's so horrible..."). Elle me ramène chez moi en voiture avec tout le reste de la famille. Et au moment de nous quitter, elle me propose de sortir "together sometime, if I get bored". C'est gentil, mais ça va aller. Je vais m'arrêter là dans les échanges. Et puis je vous l'ai déjà dit, j'ai une éthique !

L'Amérique, c'est incroyable :) ! Like it !

L'échange, le troc, le (fair) trade : CHECK !

 mon modeste intérieur
 Remarquez les peintures et autres dessins qui recouvrent les murs de ma casita...
 Tas de neige devant la fenêtre de ma chambre. C'est là, où les voitures-chasse-neige entasse la neige dès 5h du matin pour que les routes soient déblayées à temps pour aller au travail.
  Façade en adobe de ma casita. So cute !

Ma rue, West Manhattan Avenue. Ça claque, non ?
Et les autres rues de mon quartier.
Je suis à 5min à pieds de la gare de Santa Fe.
La warehouse des moins de 21 ans. No alcohol !
Et une boutique spécialisé dans les boots de cowboy pour tous les goûts.

jeudi 6 février 2014

Urgence - saison 16


Nouvelle niouze.
Feuille blanche.
Comment remplir cette feuille blanche. Quoi dire. Par où commencer. Ne pas paniquer. Trouver l'inspiration. 
Peur de la feuille blanche. 
Nourrir l'inspiration de ses propres expériences. S'approprier sans vergogne celles des autres. Provoquer l'inspiration. Voilà, c'est ça, provoquer l'inspiration. 

Il est 7h du matin, je suis en avance pour prendre le bus reliant Santa Fé à Los Alamos. Quand se déclare une douleur aiguë, insupportable, qui me transperce le dos. Je frissonne, je transpire, je m'accroche au lavabo pour ne pas m'étaler dans la salle de bain. Je récupère mon téléphone portable. Toujours l'avoir à porter de main. Se rassurer. S'allonger. La douleur ne passe pas. Comment l'atténuer. Se rappeler qu'il a neigé toute la nuit. Ramper jusqu'à la porte d'entrée. L'ouvrir, et se retrouver sur le seuil de la porte, au sol. Prendre de pleines poignées de neige et s'étaler la neige sur le dos. Anesthésier la douleur. Puis la douleur s'estompe. Reprendre ses esprits. Sourire à nouveau. Voilà, je la tiens ma niouze. J'ai mal mais je suis content. L'inspiration est là. Je sens que je vais avoir de la matière. Y a plus qu'à.
Après avoir eu le feu vert de mon assurance, je décide d'aller aux urgences. Comme je n'ai jamais aimé profiter du système, je décide de ne pas y aller en ambulance, même si ça l'aurait bien fait pour ma niouze. Tant pis. Je décide de prendre ma voiture. Racler la neige et le givre sur les vitres. Puis déblayer le trottoir de la neige, à grands coups de pelle. Je ne sens plus la douleur. Je suis tout excité d'aller aux urgences. J'ai des images de la série Urgence qui me traversent l'esprit. Des pompiers qui débarquent dans la salle d'attente des urgences, tirant une civière, sur laquelle git un mec blessé par balle ou bien désencastré de sa voiture. Le Dr. Ross et ses belles dents blanches. J'ai hâte de voir ça en vrai.
Mais avant ça, je dois traverser la ville sous la neige. Ne pas avoir d'accident pour se retrouver soi-même sur la civière... J'arrive enfin à l'hopital. Son nom Christus St Vincent. Il est vaste et s'étalle sur des dizaines de buildings. Je trouve les urgences puis une place de parking qui n'est pas réservée aux docteurs, aux administratifs, aux patients avec rendez-vous, aux patients sans rendez-vous mais ne restant pas plus de 30 min, aux agents du gouvernement, aux agents de la sécurité... Je me fraye un chemin dans la neige. Ne pas tomber. Puis franchir les portes des urgences. Surprise, personne dans la salle d'attente. Pas même un cri. 1ère déconvenue. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir raconter dans ma niouze. A nouveau, peur de la feuille blanche. A l'accueil, je donne mon nom et ma date de naissance, et je suis pris en charge directement. Pas le temps de s'assoir dans la salle d'attente et d'observer ce qu'il s'y passe. Une infirmière me pose tout un tas de questions en ligne. On prend ma tension. Elle est haute, comme d'habitude, à chaque fois que je suis au Nouveau-Mexique. Rien de nouveau. "C'est l'altitude", ou bien c'est dû à votre douleur. Puis on me transfère dans ma chambre. La chambre ressemble à celle des séries. Équipée de tout un tas de matériel, ainsi que du fameux rideau qui protège ton intimité. Un autre infirmier, Carlos, vient me poser les mêmes questions afin de remplir SON questionnaire en ligne. Il s'occupe de moi et me donne 2 missions. Je dois revêtir une belle tenue de malade et pisser dans un bocal. Mission accomplie et avec le sourire (cf photo). Puis c'est au tour de l'interne de me reposer les mêmes questions. J'améliore mes réponses. Je fais tantôt de l'humour, tantôt dans le dramatique. Ça plait. Je fais le show. Entre temps, une comptable est venue s'assurer que je vais bien payer. Elle a tout pris, mon numéro de passeport, mon adresse, mon tel, ma religion (what ?), le nom, numéro et adresse d'un ami aux USA (Zhe Frenchy, t'es fiché maintenant !). Je luis propose de prendre mes empruntes digitales pendant qu'elle y est. Humour. Bof, ça ne passe pas avec elle. Elle me demande ma carte d'assurance santé. J'en ai pas. Elle est étonnée. J'en profite pour militer un petit peu et lui expliquer qu'en France, on est tous assuré par la même assurance santé et qu'il n'est donc pas nécessaire d'avoir une carte d'assuré. Elle écarquille ses yeux. Ne me crois pas. Enfin arrive le médecin chef. Il m'explique ce que j'ai. Rien de grave. Mais faudrait quand même en avoir le cœur net par un CT scan. En effet, il se peut qu'il y ait des complications dans 10% des cas. En France, on te le fait. Aux USA, on te dit d'abord le prix. Et dans mon cas, c'est au moins 1000$. Si t'es mal assuré, tu lui dis non merci poliment et prie pour que tu sois dans les 90%. Si t'es bien assuré, tu lui dis, vas-y, vérifie que je ne sois pas dans les 10%. Avant de partir, il me gratifie d'un "Take care Bro" ! Les brancardiers qui m’emmènent au CT scan, lui font écho et me donnent du "Bro" en veux-tu en voilà. L'un d'eux ira même jusqu'à me dire "Hold on Bro. God bless you". Au bout de 3h sur place, il est temps de quitter les urgences, avec un rendez-vous à prendre chez un médecin pour le suivi et une ordonnance pour des anti-douleurs. Pas moyen de repartir avec ma radio à 1000$. Sur le chemin menant vers la sortie, je croise un pompier tirant un brancard, vide. La salle d'attente s'est remplie, mais on est loin de ce qu'on voit dans les séries américaines.
Passage par la pharmacie. Mes médocs sont contrôlés par l'état. Je dois être fiché, au cas où je deale mes anti-douleurs. Pas de passeport américain, pas d'anti-douleur... La pharmacienne est catégorique. Après d’âpres négociations et un coup de téléphone au siège de la pharmacie, ils obtiennent le feu vert. Je ressorts avec 15 pilules. Il est tant de rentrer chez moi et me mettre à écrire. Je crois que je tiens ma niouze ! La peur de la feuille blanche a disparu pour quelque temps.

Tester les Urgences américaines : CHECK !!


 Devant chez moi, avant de prendre la voiture
 Sur la route vers l’hôpital
Suivre le bon panneau
à l’hôpital.