dimanche 9 mars 2014

Ma voiture bleue

Rose, c'est pour les filles.
Bleu, c'est pour les garçons.
Et comme je suis un (grand) garçon, ma nouvelle voiture est bleue.
Et pour vous, rien que pour vous, voici en exclusivité, des photos de ma voiture bleue coréenne qui va vite, et qui vient de loin. Elle a dû parcourir quelques milliers de miles depuis le Missouri, et traverser deux états, et pas des moindre, l'Oklahoma et le Texas, avant d'arriver jusqu'à moi.
Et dire que Vendredi soir, des vilains ont voulu me l'enlever. Je m'explique. Vendredi fin d'après-midi, il est temps de quitter le labo à moitié vide. Il fait sombre, les lumières des couloirs et des bureaux sont éteintes pour la plupart, sauf les bureaux des chinois, toujours les derniers à partir. YoungMum me propose un ride pour SF. Elle doit se rendre à ABQ. En chemin, on discute, on débat, on parle, on s'exprime, on déblatère, on se raconte... c'est devenu un rituel avec YoungMum. une espèce de joute verbale. Les idées, les concepts fusent. Rien n'est connu d'avance. Il en sort toujours quelque chose de nouveau. Et puis on pousse des ohhhh, des wouahhhh, des "what a beautiful sky". Il est presque 6pm, c'est le moment où le ciel bleu se pare de sa tenue striée de rose, avec un léger fard gris foncé nuageux. Le soleil décide de jeter ses derniers rayons jaunes d'or dans la course. Les mesas s'en emparent pour rivaliser d'ombre et de lumière face aux canyons. La terre rouge et ocre s'oppose de toutes ses force au ciel bleu. Spectacle quasi mythique. On trace la route. Jusqu'à notre arrivée sur le parking-lot où je laisse ma voiture bleue, chaque matin, pour prendre le bus blanc, flanqué du signe Zia, emblème du Nouveau-Mexique. Mais cette fois, un truc bizarre, quelque chose de blanc accroche mon regard. Qu'est-ce que c'est que cette feuille blanche sur ma portière ? Je m'approche. La feuille est en partie dactylographiée, en partie remplie au stylo à bille bleu. Il est écrit que j'ai violé le parking et qu'en conséquence, ma voiture bleue sera remorquée au loin, à mes dépends. Ou bien un truc du genre. Je comprends rapidement que ma voiture bleue a violé le parking goudronné du SPA center et que sa place, c'est juste un peu plus loin, avec les gros graviers. Pourquoi rejeter ma voiture bleue alors que le parking goudronné et lisse, du SPA center, est toujours vide ou presque. Jalousie. Discrimination. Personne n'est là pour nous répondre. Juste cette feuille blanche. Nous quittons, ma voiture bleue et moi, cet espace qui ne veut pas de nous, et rentrons à la maison. Abattus. Demain, nous irons donc rejoindre sur les gros graviers et les nids de poules, les autres, les rejetés de l'autre coté de la petite bordure verte de démarcation, juste en face des places goudronnés et lisses, et toujours vides....




lundi 3 mars 2014

Retour de week-end

Plus d'une semaine s'est écoulée depuis ma dernière niouze, le clavier me démange, allez, je me lance. Et dans le désordre, s'il vous plait. Pourquoi vouloir toujours faire quelque chose de structuré, qui suit un plan bien détaillé...
Aujourd'hui, par exemple, je suis allé chez le docteur pour mon suivi médical, suite à mon calcul rénal début Février. J'y allais plus par acquis de conscience que par véritable nécessité. Et puis j'avais prévenu mon assurance pour qu'elle se charge de payer la note sans que je débourse un centime. Dans ce cas, pourquoi se priver d'aller faire un tour dans un cabinet privé de consultations. Que le délire commence! Le cabinet du médecin ne se trouve pas dans un bâtiment quelconque, mais au medical plaza center, s'il vous plait. C'est un bâtiment en adobe de plain-pieds, avec un joli patio et une belle fontaine en son centre, des arbres, des bancs et tout autour du patio, des portes, chacune donnant accès à un spécialiste. Le mien, un urologue, a la porte 300. Dans son cabinet, une foule de personnes s'active : 2 secrétaires médicales et au moins 3-4 infirmières (et ce n'est que la partie visible). On me fait signer tout un tas de papier (assurance santé, déclinaison de toute responsabilité...). Je suis en avance, ça tombe bien. Cela me prendra bien 30 minutes pour tout remplir. Puis vient mon tour. On me dirige vers un box tapissé de beaux schémas explicite sur l'anatomie masculine et ses différentes pathologies (ça fout les boules, c'est le cas de le dire :) !!). Une infirmière me prend la tension (L'infirmière (étonnée) : "houlala, elle est haute, c'est normale chez vous ?" Moi (inquiet) : "euh, bah non, en fait si, ici, au Nouveau-Mexique, mais en France, elle est plus basse, j'ai checké avant de partir." L'infirmière (souriante) : "Non mais en fait ne vous inquiétez pas, des tas de gens rêveraient d'avoir votre tension." Moi (énervé) :"Putain, mais est-ce que quelqu'un connait son métier et va pouvoir m'expliquer cette histoire de tension un jour !"). Puis vient le docteur. A peine le temps de me lever, qu'il m'a déjà salué et s'est assis pour commencer son speech. Je n'ai jamais vu un médecin parler aussi vite (un vrai rappeur). En 5 minutes, mon affaire était expédiée, avec un seul mot d'ordre : il faut boire de l'eau pour éviter les calculs rénaux. Ah la belle affaire, ça, c'est de l'info. Merci monsieur le professeur ! Je ressors de là, encore enivré par tous ces mots expédiés à la va-vite, quand on m'annonce la note : $209 ! Gloups. Et mon assurance, elle ne marche pas ? "Non monsieur, ici on est dans un cabinet privé et nous ne fonctionnons qu'avec des assurances américaines" (et le reste du monde on s'en fout). Je ressors de là écœuré, bien décidé à me battre pour que notre système français ne disparaisse jamais (leçon du jour).
Sinon, Vendredi, c'était le 28, dernier jour du mois de Février. Et qui dit dernier jour, dit.... changement de voiture :). Yes ! Marre de mon Veloster qui n'a de rapide, que le nom. Par contre, c'est aussi le jour où je remarque que j'ai un pète sur mon pare-brise... Heureusement, j'ai une assurance collision avec zéro-franchise (pas de raison que ma collision avec un cailloux ne soit pas prise en compte). Je retourne donc à l'aéroport d'Albuquerque (ABQ, prononcé "è-bi-qiu") où mon "copain" José (prononcé "Ro-cé") de l'arrivée m'attendait derrière son comptoir. Ca n'a pas loupé, il m'a reconnu de suite, demandé si mes recherches au lab avançaient bien, et patati, et patata et qu'il connaissait des bars sympas à ABQ, et qu'est-ce que je faisais ce soir... Ce soir, Rocé, je sors, et j' entraine avec moi, la copine de ZheFrenchy parti à Paris pour passer les concours CNRS. Car en plus de se retrouver seule, sans son frenchy, la copine de ZheFrenchy (que l'on va surnommer YoungMum), doit décompresser ce soir. En effet, YoungMum a passé un entretien téléphonique super important pour un job US Fédéral (mais pas Bureau of Investigation), de manière totalement improvisée à l'aéroport d'ABQ (pour cause de mauvais calcule de décalage horaire entre Washington et ABQ, même les scientifiques ne sont pas infaillibles en calcul mental...). Le délire. 
Bref, avec YoungMum, j'arpente pour la 1ère fois, les rues d'ABQ by night. Au grès de nos pieds, nous tombons sur un concert folk/country, puis sur une soirée samba. De retour au motel, je m'aperçois que mes voisins font aussi la samba (et merde, comme à Paris). Mais cette fois, j'ai la parade. Je mets la ventil à donf pour avoir un bruit de fond, plus mes boules quies et c'est parti pour un courte nuit.
Le lendemain, samedi, je fais mon chat hebdomadaire avec mon anthropologue préférée, avant d'aller prendre mon 1er breakfast burrito, en face de l'UNM (University of New Mexico). Quelle bonne idée :) ! Nous avions devant nos yeux, de pures spécimens d'ados et d'étudiants américains, qu'on aurait dit tout droit sortis de séries TV. Le kiff. On passe un long moment à les observer, les classer, les regrouper... Passionnant !
Et puis comme il faisait moche (il a même plu, 1ère fois que je voyais de la pluie au Nouveau-Mexique !!), la journée s'est écoulée en intérieur. Nous sommes allés au musée des indiens pueblos puis avons tenté le musée du nucléaire (mais il fermait à 5pm). En chemin, nous sommes tombés par hasard sur 2 bâtiments clés de la série BrBa: le quartier général de Tuco et l'un des dinners préférés de Jesse Pinkman !!! Trop cool :) ! D'ailleurs depuis, j'ai téléchargé 5 maps qui correspondent aux 5 saisons avec les lieux et places de chaque épisode. Un truc de ouf !!
Vivement le 30, dernier jour du mois de Mars, que je change à nouveau de voiture, et ainsi devoir refaire un tour à ABQ, et avec ce coup si, mes 5 maps ! Ca va être la folie (la station car-wash, la maison des White, Pollo Hermano...). Attention, ABQ, ça va shooter grave !!

Quartier général de Tuco (en vrai, un café nommé Java Joe's)
Et le resto de Jesse (qui est le même que dans la série, rien n'a été modifié)


samedi 22 février 2014

Colorado t'es bô aussi

Aujourd'hui, je vais gravir la plus haute dune d'Amérique du Nord.
Aux USA, tout est toujours le plus ceci ou le plus cela. Par exemple dans le comté de Los Alamos, c'est là qu'il y a le plus d'impacts de foudre chaque année. Et il n'est pas rare de rencontrer des gens qui ont vus de prêt la foudre. Par exemple, ZheFrenchy a rencontré un mec, jardinier de son état, qui ne traine plus jamais dehors lorsqu'un orage se pointe. Et pour cause, un jour qu'il admirait en compagnie d'un pote, le Rio Grande serpentant tranquillement au fond d'un canyon, la foudre s'est abattue pile poil entre les deux amis, les expédiant 10 m en arrière (détail important, car en avant, ils faisaient le plongeon de leur vie dans le Rio Grande).


Bref, revenons à ce qui nous préoccupe ici, l'escalade de Zhe dune. Elle porte le doux nom de Star dune et il ne faut surtout pas la confondre avec High dune, la dune proche du parking. En effet, à cause d'une illusion d'optique, tout le monde croit que c'est la plus haute et se précipite pour l'escalader. Et là, c'est le drame, car une fois en haut, Zhe dune avec ses 30m supplémentaires, vient narguer le pauvre randonneur mal préparé.


C'est ainsi que j'ai décidé de suivre ma propre voie, de ne pas me précipiter sur la première dune en face du parking. Je suis tout seul. Le chemin n'est pas tracé. Au début, tout est simple, les petites dunes peu pentues. A piece of cake cette ascension ! Star dune, me voilà ! Sauf que voilà, marcher dans le sable, ça fatigue vite. Surtout lorsqu'il faut monter puis redescendre les petites dunes qui se trouvent sur mon chemin. Très vite, mon corps me rappelle à l'ordre. Sylvain, tu es à plus de 2700m d'altitude et l'oxygène se fait plus rare. Je tente alors d'élaborer une stratégie pour me fatiguer le moins possible. Je vais suivre les crêtes des dunes, pour toujours progresser, jamais descendre. Sauf qu'avec cette stratégie, je me retrouve vite face à un mur de sable, une pente raide de chez raide. Je tente de l'escalader gentiment, mais pas moyen d'avancer. Je fais du sur-place à brasser du sable. Seul moyen pour avancer, agiter mes jambes plus vite que le sable qui s'écoule à chacun de mes pas. Horrible. Je crois clamser. Mes poumons sont au bord de l'explosion... Un vieux gout de sang remonte dans ma bouche. Putain d'épreuve physique. Une fois passé le plus, je me retrouve enfin sur les pentes, moins raides, de Star dune. Le spectacle est magnifique. J'en oublie presque que je suis à bout de souffle. Je n'ai qu'une idée en tête, arriver au sommet de Star dune, qui est devenu au cours de cette ascension, mon petit Himalaya à moi, rien que ça ! Je fais quelques pauses pour reprendre mon souffle et m'hydrater. Enfin la dernière ligne droite. J'aperçois le sommet de la dune. Arrivé au tout en haut de la dune, une sensation de liberté énorme m'envahit. Putain, I did it ! C'est bô. Un spectacle à couper le souffle (faut croire que je n'étais pas tout à fait à bout de souffle et qu'il m'en restait un peu pour me le couper. Pas mal celle là ?!!). Le tout filmé, par mes soins, pour que vous puissiez vous faire une idée des dernières minutes de mon ascension (et de mon souffle coupé).



Je suis resté là haut, de longues minutes pour m'imprégner de la vue (et aussi pour reprendre mon souffle...). J'ai vraiment de la chance d'être la haut. Je m'envie moi-même :).

Escalader la plus haute dune d'Amérique du nord : CHECK !

mardi 18 février 2014

New-Mexico, t'es bô


Pour mon premier road trip en solo, je décidais d'aller dans le Colorado, voir les grandes dunes de sable (Great Sand Dunes National Monument, pour les puristes). Je n'y étais encore jamais allé. Et puis il me fallait traverser le nord du Nouveau-Mexique que j'affectionne particulièrement. Deux bonnes raisons pour aller voir si le sable est plus jaune là-bas.
Je partais donc de bon matin, ce dimanche, pour rejoindre ma première étape, la petite ville de Chimayo et son sanctuaire, aussi surnommé le Lourdes d'Amérique du Nord (Tient, je me demande pourquoi ils ne l'ont pas nommé New-Lourdes, comme tant d'autres villes....). En chemin, je m'arrête à la ville carrefour indienne de Pojoaque pour faire des réserves d'eau et de barres énergétique à la station service du coin. Le type à la caisse est tatoué du cou jusqu'aux phalanges des mains (peut-être celles des pieds l'étaient aussi...). C'est assez impressionnant. En regardant autour de moi, les autres clients étaient aussi tatoués pour la plupart, qui des bateaux, qui des fleurs, des cœurs transpercés, des lettres, des trucs non reconnaissables.... Me prends l'envie urgente de me tatouer un truc, et faire un peu plus couleur locale (mon pull à capuche rouge avec le symbole ZIA ne suffisant pas). Je me mets à fouiller dans la poche gauche, puis dans la poche droite de mon manteau. Lorsque je tombe enfin sur mon stylo noir 0.5 microns, ouf, je vais pouvoir me faire un beau tattoo. Lorsque je quitte Pojoaque, je me retrouve dans le pueblo de Nambé, puis dans le désert. Les paysages sont magnifiques, des mesas, des petits arbustes et des formations rocheuses à perte de vue. A Chimayo, la messe se termine. Sortent de la petite chapelle, des jeunes femmes, des hommes, des vieux, tous tatoués. Et que ça continue ! Je visite la chapelle. Au détour d'une porte, je me retrouve dans une petite pièce circulaire de 2m de diamètre, moins de 2m de haut, avec en son centre, une petite pelle de bac à sable. Tient, qu'est-ce donc ? Me voici, dans le saint des saints, dans la Holly mud room (et la petite pelle permet de récupérer un peu de terre sacrée (Holly mud)). Je ne peux m'empêcher d'en prendre un peu et m'en tartine les mains, on ne sait jamais. En sortant de la chapelle, je longe des murs sur lesquels sont collés des milliers de portraits d'inconnus et pour lesquels des gens ont certainement prié les mains pleines de terre...
La chapelle de Chimayo et sa terre sacrée
Je reprends la route et traverse à nouveau des paysages grandioses qui me bouleversent. Je ne sais pas pourquoi, mais je suis ému. Je me sens tout petit, perdu dans un monde immense. Je me sens tellement loin de Paris et de la Normandie. J'ai l'impression de découvrir un nouveau monde.
Enfin bon, je ne suis pas le premier, puisque ça et là, gisent des carcasses de voitures, des vieux-mobiles ponctuent le paysage, pour constituer de petits hameaux, des villages perdus, loin de tout. Quelques familles d'indiens pueblos ou bien des ancêtres des premiers conquistadors espagnols sont à l'origine de la plupart de ces hameaux. Drôle de mélange.
 
Je commence à avoir faim. Je choisis le restaurant avec le plus de voitures devant, à défaut d'être un gage de qualité, je suis sûr de retrouver un peu d'animation et me distraire pendant le repas. Et de la distraction, j'en ai eu. Je m'assois à une table quand le mec derrière moi, me prend par le coude et me dit que j'ai choisi "the best place". Je lui réponds et il capte directement mon accent. C'était parti pour les présentations. Lui, c'est Ron. Le questionnement "d'où tu viens, que fais-tu, depuis combien temps...." et les conseils "tu devrais gouter ça, teste le chili...". Avant de partir, Ron me file sa carte de visite avec son numéro de téléphone en me tenant toujours le coude. Et au cas où j'ai des problèmes de vue, Ron écrit en plus gros son numéro de tel sur une feuille de commande de la serveuse et me glisse, toujours en me tenant le coude, mais cette fois-ci, en me regardant droit dans les yeux : "Si tu t'ennuies, n'hésite pas à m'appeler, hein ;)!".... Ron a au moins 60 ans... Pendant ce temps, à la table d'à coté, un très vieux cowboy (je dirais 80 ans), le Stetson vissé sur la tête, n'arrête pas de poser des questions à voix basse chaque fois que la petite serveuse passe. Pourboire oblige, elle s'approche chaque fois plus prêt de lui, écoutant le vieux cowboy lui répéter sa question, tout en profitant pour lui tenir le coude, elle aussi. En sortant du resto, je tombe sur un autre vieux (décidément), en béquille celui-là. Il bafouille et me demande un "ride" pour le centre ville. Seulement, le vieux, il ne sait pas que je l'ai vu reluquer et interpeler une autre petite serveuse pendant tout le repas, en suggérant des trucs graveleux. Tant pis pour lui. Je le laisse sur place, direction le centre ville (de Taos)
En sortant de Taos, je me retrouve à nouveau plongé dans des paysages de fou. De grandes plaines de buissons, ponctuées par des petites montagnes, avec au loin, le Colorado et ses grandes montagnes au sommet enneigé. Le ciel est gris, voir menaçant. Les couleurs sont terribles. Je trippe grave et fait chauffer l'appareil photo.
 
La transition vers le Colorado, est marqué par le passage des maisons en adobe à des maisons en bois... ainsi que par les premiers coffee-shop (et oui, la vente de marijuana est légale depuis le début de l'année) !!
Il commence à se faire tard. Je décide de m'arrêter dans un village-carrefour, Fort Garland, 433 habitants, 2 motels en bord de Highway et un restaurant vide à l'heure du diner. Je suis le seul client. Je vais me coucher, des images plein la tête. Je dois me reposer, car demain est un grand jour. Je vais tenter d'escalader la plus haute dune d'Amérique du nord, soit presque 3000m d'altitude !

La maison du Christ...
 
 
 
 

 
 
 
 
Le Colorado et ses montagnes enneigées
Fort Garland, la ville carrefour

lundi 10 février 2014

Home Exchange Asymmetric

J'ai testé pour vous l'échange, le troc, le (fair) trade, redevenus à la mode en cette période de crise, de remise en question de nos modèles de société, rien que ça ! J'ai donc testé l'échange de services mais aussi l'échange de maison (mais pas encore l'échange de femme, je vous vois venir.... J'ai une éthique!!).

Ainsi outre ma mission de mulet, et l'échange de mon maigre savoir-faire contre du matériel en état de marche, j'ai surtout échangé, troqué, mon domicile parisien (un studio mal insonorisé de 20m²) contre celui d'une famille de Santa Fé. Pour que l'échange soit fair, j'ai mis sur mon annonce en ligne plus de 30 photos de mon appartement. Le studio en mode jour, le studio en mode nuit. Photos prises dans les 4 coins de l'appartement. La douche. Gros plan des toilettes. La cuisine. La vue de la fenêtre. Autant vous dire, qu'ils connaissaient mon appartement aussi bien que moi. Rien n'a pu leur échapper. Et c'est donc en pleine conscience qu'ils ont accepté le troc (je m'en suis assuré, je vous jure). Voici le deal : Je passe 3 mois dans une authentique casita datant de la fin 19ème, aux murs en adobe (petit ajout pour vous culturer, merci Sophie :)), composée de 3 grandes pièces, avec tout le kit (cheminée et chauffage au sol, dryer (sèche-linge), douche à l'italienne...). Pendant ce temps, deux sœurs vont devoir vivre ensemble pendant plus de 6 semaines, confinées dans mon studio de 20m² (la surface standard de leur dressing !). Elles devront se faire une place entre l'étendoir à linge et le lit. Et oui, ici, pas de place pour le dryer. Boire de l'eau froide, mais pas glacée, car elles ne trouveront pas de distributeur de glaçon dans le petit frigo. Et le pire de tout, elles devront partager le canapé-lit qui grincera chaque fois que l'une d'elles bougera (j'ai pourtant pulvérisé du téflon sur tous les ressorts avant de partir, mais rien n'y fait). Pas moyen donc d'aller faire pipi discrètement pendant la nuit. De toute façon, elles auraient du allumer la lumière pour éviter de trébucher sur la table basse ou bien l'étendoir à linge. Pour couronner le tout, je viens de leur apprendre que le studio se situe au 3ème étage européen, c'est à dire au 4ème étage américain (et bam! un étage de plus dans ta face). Et oui, comme il faut toujours qu'ils se démarquent de nous autres, ceux de la vieille Europe, en plus de leurs miles, leurs inches... les américains ont décidé de commencer la numérotation des étages à 1 (au lieu du rez-de-chaussé)... Ah oui j'oubliais un petit détail, les deux sœurs ont plus de 70 ans......chacune (pas au total !!)..... Mais les sisters, de vraies pionnières que rien n'arrête, ont déjà trouvé la solution. Elles prévoient d'installer une chaise au 2ème étage pour faire une pause. Et pour les courses, me diriez-vous... elles comptent tout simplement acheter pour plus de 100€ de course (en complétant avec du champagne ou de bonnes bouteilles de pinard s'il le faut) afin d'être livré gratuitement au 3ème étage.... Elles ne vont pas dessaouler pendant 6 semaines...

Pour conclure cette échange, si fair, j'ai été invité plusieurs fois à déjeuner avec les deux soeurs, leur frère, à qui appartient la casita, accompagné de sa femme, de sa fille et de sa petite-fille.

Étranges déjeuners

La femme du proprio est une artiste. Elle peint. Surtout des portraits. Et elle porte des grosses lunettes de soleil, comme celle de Jackie Kennedy. Elle a la peau lisse, très lisse. Et lorsqu'elle commande son repas, elle ne regarde pas la carte, jamais. Ça ne sert à rien. Elle demande ce qu'elle veut. Parce qu'elle le vaut bien. Et lorsque les bagels ont des graines de sésames dessus, s'en est trop. Elle ne mange que la mie au milieu du bagel...
La petite fille s'appelle Calico S. Elle ne parle pas, sauf pour geindre. Elle ne mange jamais ce qu'elle a dans son assiette. Elle dessine sur les tables (ce n'est pas de sa faute, dans chaque resto, on lui apporte le kit enfant: des crayons et une feuille à colorier). Elle écoute sa musique, avec son gros casque rose. Pour entrer en communication avec elle, tout le monde lui parle en langage des signes. Et lorsqu'elle daigne s'adresser à nous, c'est pour nous faire écouter, sur son AïePhone, son spot publicitaire (celui qu'elle a écrit elle-même, "elle est si intelligente ma fille"). Voici le spot : "s'il fait mauvais temps et qu'il y a une averse de chouettes qui s'abat sur votre quartier. Pensez à utiliser une pelle à chouettes pour déblayer votre trottoir". Voilà, c'est tout. Euh, c'est quoi ce délire ? Se sentir obliger de dire "Yes, it's so cute" (ça fait parti du deal, de l'échange (culturel)).
Au fait, pourquoi Calico S (que je demande poliment à la mère). "Le S. c'est pour Sky". Ah. Et Calico alors ? "C'est le nom qu'on donne au chatte avec 3 couleurs (en France on dit "écaille de tortue". C'est moins glamour). Car lorsqu'elle est née, elle avait des tâches de couleurs sur tout le corps. Alors, j'ai pensé tout de suite aux chattes à 3 couleurs. Et je l'ai appelé Calico. Ca lui fitte si bien, hein ?" Euh, c'est quoi ce délire ? Se sentir obliger de dire "Yes, it's so cute" (ça fait parti du deal, de l'échange (culturel)).
Quant à la mère, elle s'emballe lorsque que je décris mon boulot, les os, les microfissures, tout ça, tout ça. Elle embraye alors sur le cancer des os de son père. Des trous qu'on lui a faits dans les os. Du comblement osseux (thérapie cellulaire à partir de cellules souches. Trop coooool). Puis de la rechute et des tumeurs grosses comme des oranges dans le cerveau, qu'on devait lui enlever une à une. C'est bon, c'est bon, on mange. Arrête. Arrête je te dis. J'ai compris. Elle est de plus en plus chaleureuse avec moi (faut dire que je lui ai parlé de mon épisode Urgence, "It's so painfull, you should have called me to drive you to the emergency. It's so horrible..."). Elle me ramène chez moi en voiture avec tout le reste de la famille. Et au moment de nous quitter, elle me propose de sortir "together sometime, if I get bored". C'est gentil, mais ça va aller. Je vais m'arrêter là dans les échanges. Et puis je vous l'ai déjà dit, j'ai une éthique !

L'Amérique, c'est incroyable :) ! Like it !

L'échange, le troc, le (fair) trade : CHECK !

 mon modeste intérieur
 Remarquez les peintures et autres dessins qui recouvrent les murs de ma casita...
 Tas de neige devant la fenêtre de ma chambre. C'est là, où les voitures-chasse-neige entasse la neige dès 5h du matin pour que les routes soient déblayées à temps pour aller au travail.
  Façade en adobe de ma casita. So cute !

Ma rue, West Manhattan Avenue. Ça claque, non ?
Et les autres rues de mon quartier.
Je suis à 5min à pieds de la gare de Santa Fe.
La warehouse des moins de 21 ans. No alcohol !
Et une boutique spécialisé dans les boots de cowboy pour tous les goûts.